Carte carburant et arrêt maladie : Peut-on utiliser son badge pendant une absence pour raison de santé ?

Carte carburant et arrêt maladie : Peut-on utiliser son badge pendant une absence pour raison de santé ? #

Statut de la carte essence en cas d’arrêt de travail : droits et obligations #

La carte carburant constitue à la fois un outil de travail et un avantage en nature, selon sa modalité d’attribution, son usage et les termes du contrat de travail. Le statut précis de la carte dépend donc directement de la nature du contrat et de la politique interne de l’employeur. L’arrêt maladie suspend le contrat de travail, mais pas nécessairement les avantages liés, sauf mention expresse au contrat.

En pratique, plusieurs configurations existent :

  • Certains contrats spécifient la restitution obligatoire de la carte carburant en cas d’arrêt de longue durée ou d’incapacité partielle, notamment pour les véhicules de service dédiés strictement à la mission professionnelle.
  • D’autres prévoient le maintien de l’avantage pour le salarié disposant d’un véhicule de fonction à usage mixte, la carte carburant pouvant alors être considérée comme un accessoire de cet avantage en nature.
  • L’absence de clause spécifique expose à l’interprétation, d’où l’importance d’un règlement écrit encadrant précisément la suspension ou non de la carte lors d’une absence pour raison de santé.

En 2024, plusieurs sociétés du secteur du transport routier et du BTP ont instauré une procédure interne de suspension automatique du badge carburant dès la réception du justificatif d’arrêt maladie, afin de prévenir tout mésusage.

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L’utilisation de la carte carburant à des fins privées : risques et interprétation juridique #

La frontière entre usage professionnel et usage personnel fait l’objet d’une attention grandissante de la part de la jurisprudence. Utiliser la carte carburant pour des déplacements privés alors que le salarié est officiellement en arrêt maladie, expose à des risques multiples. L’utilisation du badge en dehors des fonctions prévues, même sans intention frauduleuse manifeste, peut être assimilée à une faute et entraîner une demande de remboursement.

En novembre 2023, la Cour d’appel de Paris a confirmé que le salarié ayant utilisé sa carte carburant durant ses congés à des fins non professionnelles devait rembourser les sommes versées au titre de cet avantage, même s’il n’était pas conscient du caractère indu de l’opération. Cet arrêt démontre que l’employeur dispose d’une base solide pour sanctionner ou réclamer la restitution des frais en cas d’utilisation inappropriée, y compris durant une période d’incapacité.
La requalification de l’usage de la carte en avantage en nature non déclaré expose l’entreprise à un risque de redressement URSSAF si l’utilisation privée n’est pas déclarée et soumise à cotisations.

  • Les inspecteurs du travail ou de l’URSSAF peuvent parfaitement exiger justification des transactions suspectes sur la période de l’arrêt maladie.
  • En juin 2022, une société du secteur logistique a dû rembourser près de 2 800 € à l’URSSAF pour usage indument déclaré de cartes carburant, avec application rétroactive sur plusieurs années.

Procédures internes et contrôles de l’employeur : comment tracer et limiter l’usage après un arrêt #

La traçabilité des transactions via une plateforme numérique dédiée permet aux responsables de flotte et aux services RH de détecter en temps réel toute opération suspecte pendant un arrêt maladie. La mise en place de contrôles automatiques et l’analyse des historiques d’achat constituent des leviers efficaces pour limiter les risques de dérive ou d’abus.

Les sociétés ayant subi des fraudes en 2022 ont renforcé leurs process internes :

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  • Suspension automatique de la carte carburant à J+1 de la notification d’arrêt maladie, avec information au salarié et consignation informatique de la date de désactivation.
  • Obligation de restitution ou de destruction physique du badge carburant pour les arrêts prolongés dépassant trente jours calendaires.
  • Vérification systématique des relevés de consommation hebdomadaires, avec croisement des plannings d’activité et des données d’arrêt.

L’absence de retour du badge peut constituer un motif de procédure disciplinaire. Le maintien d’un écrit formalisant le rappel des règles, la collecte de l’outil et la justification de chaque dépense protège juridiquement l’entreprise lors d’un éventuel contrôle URSSAF.

Sanctions disciplinaires en cas de détournement ou d’utilisation abusive #

L’usage non professionnel de la carte carburant pendant l’arrêt maladie expose le salarié à des conséquences disciplinaires. L’employeur est en droit d’engager une procédure pouvant aller jusqu’au licenciement pour faute grave, assortie d’une demande de remboursement des sommes engagées, dès lors que le règlement intérieur précise explicitement les limites d’utilisation de l’avantage.

En 2023, une salariée du secteur de la distribution ayant effectué plusieurs pleins à titre personnel avec la carte carburant pendant un congé maladie s’est vue notifier un licenciement pour faute grave, malgré sa contestation. La juridiction prud’homale a confirmé la sanction tout en validant la demande de restitution de près de 800 € de pleins indument réalisés.
Toutefois, la procédure disciplinaire doit impérativement reposer sur une information claire et préalable du salarié sur les conditions d’utilisation de la carte et les sanctions encourues. A défaut, la mesure pourrait être requalifiée comme abusive ou disproportionnée.

  • Des sociétés IT ont été contraintes, en 2022, d’abandonner des sanctions faute de preuves d’information écrite suffisante à l’égard de salariés en arrêt maladie.
  • Une sanction pécuniaire (retenue sur salaire) sans accord du salarié ni procédure contradictoire peut être annulée par les prud’hommes.

Préconisations pratiques pour éviter les litiges liés à la carte carburant pendant une période d’incapacité #

Pour sécuriser la gestion de la carte carburant dans le contexte de l’arrêt maladie, plusieurs mesures opérationnelles s’imposent. L’élaboration d’un règlement interne clair et la formalisation écrite des procédures de suspension ou de restitution constituent des garde-fous indispensables pour prévenir tout mésusage.

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  • Rédiger une clause contractuelle spécifique prévoyant la suspension automatique de la carte en cas d’arrêt maladie supérieur à X jours, la restitution physique sous 48 h et le rappel expresse des conséquences financières d’un usage non autorisé.
  • Assurer une traçabilité renforcée des transactions via un outil informatique de gestion et imposer la justification de chaque dépense effectuée durant la période d’inactivité.
  • Mettre en place un accompagnement RH visant à informer précisément chaque nouvel entrant sur la politique d’utilisation de la carte, avec signature électronique d’un reçu et de l’annexe au règlement.
  • Prévoir une procédure d’audit interne annuel, incluant la récupération des badges non restitués et le contrôle des transactions suspectes sur l’année civile.

En complément, l’intervention proactive du département RH dès la déclaration d’arrêt maladie permet d’anticiper les potentiels litiges : en 2024, une PME industrielle a réduit de 70 % les contestations grâce à ce dispositif et la transparence totale sur les règles d’usage.

Notre avis est sans équivoque : la prévention par l’écrit, l’information claire et la traçabilité sont les piliers d’une gestion saine de l’avantage carburant. Les entreprises qui mettent en place un encadrement rigoureux s’épargnent la plupart des contentieux, tandis que les salariés bénéficient d’un cadre protecteur, facilitant la compréhension de leurs droits et devoirs.

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